Pyrénées: Il faut sauver le desman, le plus mystérieux des mammifères français...
Le desman, petit mammifère insectivore des cours d’eau pyrénéens, est désormais classé parmi les espèces « vulnérables ». Mais un plan d’action européen existe pour le sauver…
Seulement découvert en 1811, le desman reste un animal méconnu.
- Le plan quinquennal Life + doit aider à sauvegarder ce mammifère.
L’information a rencontré un certain écho, lors de sa divulgation mi-novembre : une espèce de mammifères sur trois se trouve en danger dans notre pays. Au milieu des médiatiques ours, loups, lynx et bouquetins, le sort du desman des Pyrénées n’a en revanche guère ému les foules. Comme d’habitude.
Pourtant, le Galemys pyrenaicus, appelé aussi rat-trompette, a vu son statut se dégrader entre 2009 et 2017 dans le classement du comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), en passant du niveau « quasi menacé » à « vulnérable ».
Depuis sa découverte très tardive, en 1811, ce petit animal essentiellement nocturne, semi-aquatique et insectivore, à la trompe mobile, reste un mystère sur pattes. Historiquement présent tout le long de la chaîne montagneuse et dans le nord-ouest de la péninsule ibérique, il a été repéré jusqu’à 2 700 mètres d’altitude.
« On n’a jamais observé de bébé desman ! »
« Il y a très peu d’espèces de mammifères qu’on connaît aussi peu en France, indique Emile Poncet, chargé d’études au Conservatoire d’espaces naturels (CEN) de Midi-Pyrénées. On ne sait rien par exemple de ce qui touche à sa reproduction : on n’a jamais observé de bébé desman ! »
Le travail du CEN sur les aires de répartition du rat-trompette, appuyé sur la quête de ses excréments très spécifiques, a permis à l’UICN de déterminer le nouveau classement de l’espèce. L’établissement régional est en charge de Life +, le projet européen quinquennal qui a succédé en 2015 au plan national d’action (PNA) établi en 2010.
« Nous testons notamment des méthodes de conservation sur certains sites, afin de voir si elles sont efficaces pour les développer ailleurs, reprend Emile Poncet. Sur certains cours d’eau, nous créons de l’habitat en posant des blocs de roches. » Cent trente tonnes de granit ont ainsi été déplacées cet automne vers les berges de l’Aston, en Ariège.
Dans ce département, et plus généralement dans la partie orientale des Pyrénées (Aude et Pyrénées-Orientales), les populations de desmans semblent moins régresser qu’au centre ou à l’ouest de la zone de répartition. Pour des raisons restant à déterminer, comme la plupart du temps avec cet animal cachottier.
Une caravane pour porter la bonne parole
Life + comprend aussi un volet éducation, auprès de scolaires, du grand public mais aussi de personnes concernées par la gestion des milieux naturels. En 2015, 2016 et 2017, les animations de la caravane du desman ont ainsi permis de sensibiliser quelque 1 200 personnes par an.
Pas du luxe, selon Emile Poncet :
« Même dans les Pyrénées, des gens qui habitent depuis toujours dans certaines vallées ne connaissent pas l’animal. Alors, imaginez quand on s’éloigne de la zone de répartition… »
Comme lui, ils sont près d’une trentaine dans le Sud-Ouest à plancher sur le discret insectivore, qui mesure entre 24 et 29 cm, dont plus de la moitié pour la queue. « Le desman mérite qu’on s’y intéresse, précise le scientifique. Il a beaucoup de choses à nous révéler. » Mais, pour cela, il faut le protéger et encadrer les activités humaines qui dégradent les cours d’eau, et par conséquent son habitat.