« Je la trouvais pire que belle, dangereuse », disait de Jeanne Moreau, Brigitte Bardot, sa partenaire dans «Viva Maria» de Louis Malle.
"Elle était ce que je n’étais pas et j’étais ce qu’elle n’était pas. Nous n’étions pas amies dans le joli sens du mot, nous étions complices. J’insiste, complices comme deux sœurs peuvent l’être. L’une comme l’autre, nous avons vécu par chance une époque exceptionnelle, propre à nos métiers. Nous avons partagé ce film de Louis Malle, “Viva Maria !”, qui restera dans les annales et dans nos deux vies. Nous nous sommes rencontrées, la première fois, à son domicile rue du Cirque.
J’avais 30 ans, Jeanne quelques années de plus et déjà un immense passé de comédienne exceptionnelle. Face à elle, je réalisais qu’il fallait que je relève le défi. Mais l’avoir comme partenaire, c’était la chance de devenir son égale dans l’esprit du public. Ma nonchalance, une certaine paresse naturelle pouvaient jouer contre moi dans ce projet. Il allait falloir jouer gros et serré. Et comme je déteste perdre… Cela dit, cette rencontre fut agréable à travers nos rires spontanés. Nous étions rivales, certes, mais en même temps très bien élevées. Nous avons répété “Ah les petites femmes de Paris”, la chanson qui allait devenir mythique, en nous tenant par la taille comme deux gamines qui pouffent de rire.
"Je ne l’oublierai jamais"
Je me souviens que ma voix s’étranglait, quand la sienne s’épanouissait ! Je trouvais Jeanne simple mais sophistiquée, chaleureuse mais dure, séduisante mais redoutable. Enfin, je la trouvais telle que je l’imaginais, avec son extraordinaire pouvoir de séduction qui dissimulait mal son caractère d’acier trempé. Je la trouvais pire que belle, dangereuse. Je comprenais que les hommes en soient fous. Nous étions deux fauves, mais complémentaires. Jusqu’au jour où maman Olga, mon agent de l’époque, est arrivée au Mexique avec une pile de journaux. Jeanne faisait la une partout ! En français, en allemand, en anglais, en italien, même en japonais. Ce jour-là, j’ai pris la rage. Fini, la nonchalance, la paresse, les refus de photos… J’ai ouvert mes portes et je me suis livrée, insolente, sous tous les angles. J’ai sorti ma guitare, j’ai dansé pieds nus sous les objectifs, j’ai chanté. Les photographes étaient aux anges. Cette revanche s’est déroulée à Cuernavaca, et j’ai gagné la deuxième manche. Aujourd’hui, je garde dans mon cœur le souvenir d’une immense actrice, d’une femme brillante et intelligente. Je ne l’oublierai jamais. Elle a fait partie de ma vie comme de nos vies."
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