Les corridas, essentiellement la mise à mort et le travail des picadors, ont toujours divisé l’opinion publique. Au matin du XXIe siècle, le camp des opposants semble gagner du
terrain
>>Bernard Laporte manager général du RCT : POUR
Comment êtes-vous devenu aficionado ?
Dans un premier temps (j'avais 19-20 ans), je trouvais ce spectacle barbare. Et puis, je suis allé à la rencontre d'aficionados, de toreros. J'ai découvert tout un univers. On m'a expliqué
le pourquoi du comment. J'ai vraiment commencé à aimer la corrida quand on me l'a bien expliquée. Après mais après seulement, j'ai été séduit.
Quel regard portez-vous sur le toro de combat ?
Les données sont assez simples : quelles chances a un toro dans l'arène ? À l'abattoir, il n'en a aucune. Et moi personnellement, je préfère voir un toro combattre et mourir sur scène qu'un
bœuf se faire abattre dans une salle obscure et le retrouver dans mon assiette. Il ne faut pas oublier que la bête noble qui meurt dans l'arène a eu le privilège d'être sélectionnée. S'il
pouvait parler, je suis sûr que le toro choisirait de périr dans l'arène plutôt qu'être tué à l'abattoir.
Comprenez-vous le combat mené par les anti-corridas ?
Quand on ne connaît pas, on ne comprend pas. Les opposants, qui sont par ailleurs respectables, mènent leur combat. Ils oublient parfois qu'il faut faire preuve de tolérance et de respect.
Avant de s'attaquer à la corrida, je crois qu'il y a des problèmes bien plus sérieux et graves à résoudre.
Comprenez-vous qu'on puisse aimer les toros et les tuer ?
Ce qu'il y a de troublant, c'est de côtoyer des gens aussi passionnés et engagés dans ce petit monde particulier. Voir effectivement l'amour profond qu'ils portent au toro est étonnant. Vu
de l'extérieur, on a du mal à comprendre. Les émotions qui se dégagent au cours d'une course sont incroyables. Quand on perçoit la connivence qui existe entre le toro et le torero, on ne
peut que vibrer.
En tauromachie, l'intelligence prime sur la force brute. Selon vous, c'est une leçon de vie ?
Quand le toro tout en puissance et en muscle surgit du toril, le premier sentiment qui domine est la peur ressentie vis-à-vis du torero. Et puis, peu à peu la technique associée à
l'intelligence prend le pas sur la force et la violence brutes du fauve. La plupart du temps, l'homme l'emporte sur le toro. Comme quoi dans l'arène ou la vie de tous les jours,
l'intelligence prime sur tout le reste.
>>Brigite Bardot, comédienne : CONTRE
Un dialogue est-il possible avec les acteurs de la tauromachie ?
Certainement pas ! Ces gens-là sont cruels, inhumains. La mort du taureau est un acte d'une cruauté absolue. On lui transperce les poumons avec des pics avant de l'achever devant des
milliers de gens. Vous trouvez cela acceptable ? Moi non !
Vous craignez que les Sages se prononcent en faveur du maintien ?
Absolument, d'autant que le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, faisant fi de son droit de réserve, s'est prononcé en faveur de la corrida. Sa prise de position est tout à la fois
incroyable et intolérable. C'est à vomir.
Cette intervention du ministre vous fait-elle peur ?
Sans aucun doute. Car il bafoue les principes de la République et cherche à influencer les Sages. De plus, il est né à Barcelone où la tauromachie est désormais interdite. De quoi se
mêle-t-il ?
La lettre ouverte que vous venez de cosigner avec Alain Delon et Jean-Paul Belmondo est un cri du cœur.
Trois stars face au lobby de la tauromachie peuvent-elles faire bouger les lignes ? Je l'espère. En tout cas, nous sommes des dizaines de millions à hurler notre colère à l'encontre de ces
pratiques.
Vous avez défendu la cause animale auprès d'un grand nombre de Présidents. Quels souvenirs avez-vous?
J'ai rencontré le général De Gaulle, Georges Pompidou, Valéry Giscard d'Estaing, François Mitterrand et Jacques Chirac. Ont-ils entendu mes doléances ? Pour certains la réponse est, hélas,
négative.
Et le Président Hollande ?
Je ne le connais pas. Mais cela ne change rien. Ces jeux du cirque ne font pas partie de nos traditions, de notre culture.
Vous avez rarement été aussi agacée, pourquoi ?
Je vais avoir 78 ans. Et lorsque je regarde autour de moi, j'ai l'impression de vivre dans un monde qui n'a jamais été aussi barbare, primaire et sanglant. Il y a des guerres partout. Cela
fait froid dans le dos.