La pêche aux requins ouverte à La Réunion : ils sont pourtant indispensables
Par Christophe Marie
Fondation Bardot
LE PLUS. Alors qu'un requin tigre vient d'être prélevé au large de La Réunion dans le cadre de la campagne de pêche organisée par l’État, à la suite de la multiplication d'attaques contre des surfeurs, Christophe Marie, porte-parole de la Fondation Brigitte Bardot, s'insurge contre cette initiative qui n'a selon lui de scientifique que le nom.
Un requin blanc au large des cotes de l'Afrique du Sud (SIPA).
Alors que les requins tuent, en moyenne, une dizaine de personnes chaque année dans le monde, il y aurait eu pour la saison 2011-2012 143 accidents de chasse rien qu'en France.
Pour fêter "l'année de la biodiversité" à la Réunion, le gouvernement français a autorisé la capture de 10 requins tigre et 10 requins bouledogue pour un programme "scientifique" que ne renieraient pas nos amis japonais adeptes de la science, dès lors qu'elle permet la mise à mort de centaines de baleines (dont la viande non scientifique est commercialisée).
Il faut dire qu'à la Réunion on vient de découvrir un truc incroyable, sous la vague, il y a une vie marine et même que parfois elle mord...
Les requins, coupables désignés
Seulement voilà, les requins ne vont pas en mer pour faire du surf, c'est leur habitat, leur environnement. Alors pour comprendre ce que font ces drôles de poissons sous l'eau, le gouvernement autorise une autre étude scientifique qui consiste à placer, dans l'estomac de 80 requins, une sonde acoustique permettant un suivi des individus.
Enfin ça, c'est la théorie. Car dans la pratique, "l'opération" se fait dans l'urgence, en tailladant ça et là dans les chairs pour faire rentrer la sonde. Si le requin s'en remet, c'est déjà en soit un exploit.
Le surfeur sur sa planche est une cible potentielle pour le requin qui, vue de dessous, le prend pour une tortue marine. Ces attaques sont évitables, il suffit de respecter quelques règles de base comme ne pas prendre la mer en fin de journée lorsque la luminosité baisse, ne pas aller en mer dans une eau trouble (après la pluie, houle)...
Toutes ces conditions négatives étaient réunies lors des dernières attaques mais on ne revient pas sur l'irresponsabilité des surfeurs, les coupables désignés sont les requins.
Les chasseurs, bien plus dangereux que les requins
Plus grave encore, les "amoureux" de la mer ne veulent plus de la réserve naturelle marine qui a pourtant permis de protéger, un peu, la barrière de corail et maintenir la vie sur les côtes réunionnaises.
Ils ne veulent plus non plus des requins qui sont indispensables à la biodiversité marine, requins qui permettent notamment d'éviter la multiplication des méduses qui, au passage, font chaque année dix fois plus de victimes humaines que les requins.
Si le gouvernement devient le protecteur des surfeurs face à la menace "requin", sera-t-il le protecteur des promeneurs face à la menace "chasseur" ? Contrairement au surfeur qui s'introduit dans un habitat qui n'est pas le sien, le promeneur est victime du "chasseur" qui s'approprie tous les espaces, y compris privés, pour tirer à vue (sans voir toujours où il tire).
143 accidents de chasse lors de la dernière saison en France... Qu'attend le gouvernement pour lancer une recherche scientifique sur ce drôle d'individu, terriblement dangereux et nuisible, qu'est le chasseur ?
Peut-être faudrait-il songer à introduire une sonde dans son estomac à lui aussi, afin de contrôler ses mouvements et limiter sa prédation plus ou moins accidentelle. On crie au loup (il ne fait pas bon être loup non plus même s'il n'attaque jamais l'homme), au requin... Mais qui criera au chasseur ?
L'urgence est de laisser les requins en paix et de désarmer les chasseurs, tout le monde y gagnera, à commencer par la biodiversité.
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