Le Festival de Cannes, qui célèbre son 65e anniversaire à partir de mercredi, a été marqué par de nombreux scandales au cours de son histoire.
La polémique déclenchée en fin de semaine dernière par le collectif féministe La Barbe, qui regrette que tous les films en lice pour la Palme d’Or cette année soient réalisés par des hommes,
s’insère dans une longue série de scandales. Retour sur les moments les plus sulfureux de l’histoire du festival de Cannes.
Des débuts perturbés par la guerre !
1939. Le Bossu de Notre-Dame ouvre ce qui devait être le premier festival international de Cannes, le 31 août. À l’origine de l’événement, avec le soutien du
gouvernement, le diplomate Philippe Erlanger souhaite faire pièce à la Mostra de Venise, devenu un outil de propagande fasciste. Mais l’Allemagne envahit le lendemain la Pologne, la guerre est
déclarée et le festival annulé.
Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, en 1946, diplomatie oblige, le « vrai » premier festival de Cannes a lieu. Mais dès
1948, pas de Festival, faute de financement dans une France en pleine reconstruction. Idem en 1950.
Mitchum piégé, des films retirés
1954. Robert Mitchum se fait piéger lors d’une séance photo en serrant de trop près une starlette britannique aux seins nus, Simone Silva. L’acteur américain se remettra de la
polémique, mais pas la pin-up, expulsée de Cannes, harcelée par les ligues de vertu. Elle se suicidera trois ans plus tard.
Premiers sujets contestés, en 1956, le documentaire d’Alain Resnais sur les camps de concentration, Nuit et brouillard, est retiré de la sélection sur l’insistance de
la délégation allemande. Le cinéaste français subira la même mésaventure en 1959, avec le retrait de Hiroshima mon amour à la demande des Américains, dans un Festival
alors contraint de composer avec les gouvernements.
Les photographes, eux, s’intéressent surtout à Kim Novak, qui émeut jusqu’au jeune critique radical François Truffaut, et à Brigitte Bardot, qui tourne cette année-là Et Dieu créa la
femme.
Sifflets et cohue
1960 : Une des plus mémorables années à scandale. Des rixes opposent spectateurs conquis ou hostiles au récit déconstruit de L’aventura d’Antonioni, et des
sifflets accueillent la Palme d’or attribuée à La dolce vita de Fellini.
Mai 68 « déborde » à Cannes. François Truffaut et Jean-Luc Godard s’accrochent au rideau de la scène pour empêcher la projection d’un film. Le
réalisateur de La Chinoise interpelle les festivaliers : « moi je vous parle solidarité avec les ouvriers qui occupent les usines Renault et vous me répondez
travelling et gros plans ». Dans la cohue, le Festival est contraint de clore le 19 mai, cinq jours avant son terme.
Nouveaux scandales en 1973, après les projections de La grande bouffe de Marco Ferreri et de La maman et la putain de Jean Eustache. Cannes reflète les
soubresauts des années 70 : intervention violente des CRS lors d’une projection d’un film pro-avortement, Histoire d’A, en 1974.
« Si vous ne m’aimez pas… »
1980. La direction multiplie les subterfuges pour pouvoir projeter l’hallucinant Stalker d’Andrei Tarkovsky, au nez et à la barbe des Soviétiques. Les bobines
arrivent sous un nom d’emprunt, le projectionniste est enfermé dans sa cabine, et la délégation soviétique furieuse sera promenée d’un bout à l’autre de la Croisette pendant la durée de la
projection.
1987. Maurice Pialat reçoit la Palme d’Or pour Sous le soleil de Satan : « Si vous ne m’aimez pas, je peux vous dire que je ne vous aime pas non
plus », lance le réalisateur français à la partie de la salle qui siffle copieusement.
En 1999, une mémorable bronca accueille les choix radicaux du jury présidé par le Canadien David Cronenberg : la Palme à Rosetta des frères Dardenne, trois prix à
L’Humanité de Bruno Dumont et seulement un accessit pour Tout sur ma mère d’Almodovar, chouchou de Cannes.
Lars Von Trier exclu
2004, un an après l’invasion de l’Irak, le jury présidé par Quentin Tarantino attribue la Palme d’or à Fahrenheit 9/11, charge anti-Bush signée Michael Moore.
Lors de la dernière édition, en 2011, le réalisateur danois Lars Von Trier provoque la presse en disant « comprendre » Hitler en tant
qu’« homme », pendant la présentation de son film Melancholia. Il est déclaré « persona non grata » par le conseil
d’administration du Festival.
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