Brigitte Bardot : son testament intime...
Dans un nouveau livre, « Larmes de combat », Bardot revient une dernière fois sur sa vie et rétablit quelques vérités. Comme un ultime message.
l n'y aura pas d'autre livre, elle le promet : ses Larmes de combat, titre de son nouvel ouvrage, seront les dernières qu'elle versera avant de quitter ce monde. Après la publication de ses mémoires, dans les années 1990, qui furent un véritable succès, Brigitte Bardot entend fermer une bonne fois pour toutes l'armoire aux souvenirs, régler ses derniers comptes, rétablir quelques vérités et rappeler surtout les combats qu'il reste à mener pour la cause animale, à laquelle elle consacre sa vie depuis plus de quarante ans. Avant de disparaître, la star des sixties réclame encore et toujours plus de morale et d'éthique dans nos relations avec les bêtes, l'abolition de l'hippophagie, la fin de l'abattage sans étourdissement, la suppression de la corrida et des chasses à courre... À 83 ans, son dernier livre a tout d'un testament. Morceaux choisis.
Célébrité
« J'ai été considérée comme l'une des plus grandes stars du monde et, pourtant, je ne suis rien. Cette lucidité m'a toujours habitée. (...) Retourner dans l'anonymat complet est mon rêve. Je me sens prisonnière de moi-même. La plupart de gens connus ne s'appartiennent plus vraiment, c'est vrai. »
Race
« Je ne fais pas partie de l'espère humaine. Je ne veux pas en faire partie. Je me sens différente, presque anormale. Aussi longtemps que l'animal sera considéré comme une espèce inférieure, qu'on lui infligera toutes sortes de maux et de souffrances, qu'on le tuera pour nos besoins, nos loisirs et nos plaisirs, je ne ferai pas partie de cette race insolente et sanguinaire. »
Beauté
« Je ne me suis jamais sentie belle. (...) J'ai toujours été indéterminée, voire incrédule, quant à l'apparence que je renvoyais. Cela vient probablement du fait que maman m'a collé un appareil dentaire durant mon enfance, ce qui, du reste, s'accordait très bien avec mes grosses lunettes et ma vilaine coiffure... J'étais affublée d'une permanente bien trop frisottée pour conjurer le sort de mes cheveux raides comme des baguettes. J'avais une telle horreur de mon physique que, lorsque j'ai eu 10 ou 11 ans, j'ai décidé de prendre le parti de cette laideur. Je me disais : Je suis moche, cela ne va pas être facile dans la vie, alors accepte-le. Et cela m'est resté. Cela peut étonner, mais je n'ai pas du tout confiance en moi. Tout me terrorise. »
Larmes
« Je ne pleure jamais. Du moins, pas en public. Je m'y refuse. Ce serait pour moi un signe de faiblesse. Je n'aime pas me plaindre, j'ai horreur de l'impudeur des sentiments. Je n'aime pas faire partager mes douleurs profondes aux autres. Pas même à mon mari. En revanche, dans le secret de ma chambre, dans l'intimité de mon bureau, il m'est arrivé de me défouler. »
Argent
« Même dans la plus grande richesse, l'avoir ne m'a jamais intéressée. Je n'ai jamais été attirée par le luxe, la cherté, les bijoux. Tout cela a été un moyen, jamais une fin. (...) Je m'en suis séparée avec un peu de déchirement, mais je me disais que tous ces trucs-là étaient des objets. Les souvenirs se situent dans le cœur, pas au creux d'un tissu ou dans le bois d'une table. Alors, j'ai laissé partir tous ces morceaux de vie, car j'avais l'intime conviction que chacun d'entre eux servirait à sauver des animaux. »
Cinéma
« Le cinéma n'a été qu'un marchepied, je n'ai jamais aimé cela. Au début, cela m'amusait, on parlait de moi... Et, très rapidement, cela m'a vraiment étouffée et détruite. Pendant la vingtaine d'années où je tournais des films, chaque fois que je débutais un long-métrage, je développais des herpès. La simple lecture d'un scénario m'angoissait, comme quand on amène un gosse à l'école. J'appréhendais, j'y allais à reculons, car je considérais que cela ne servait à rien. (...) J'avais un besoin viscéral de faire des choses vraies. »
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Amour
« L'amour en tant que tel ne vaut rien s'il n'est pas passion. J'aime l'amour, c'est bien pour cela que j'ai souvent été infidèle. À chaque relation, je repartais sans cesse en quête d'autres amours quand le présent devenait un peu tiède. Je n'aime pas l'entre-deux, le moins bien. J'ai toujours recherché la passion et, quand elle touchait à sa fin, je faisais ma valise. L'amour, vécu de façon innée et instinctive, a toujours guidé mes pas, mes jours et mes nuits. »
Maternité
« L'instinct maternel s'apprend, avec du temps et dans une vie calme. Moi, j'en ai été privée et je vis cette déchirure encore aujourd'hui. Durant l'enfance de Nicolas, nos rapports étaient pénibles. Pour lui comme pour moi. Et puis les choses se sont apaisées. Aujourd'hui, nous nous appelons régulièrement. Vivant en Norvège, il me rend visite une fois par an, à La Madrague, seul ou accompagné de sa famille. (...) Nicolas ne semble pas m'en vouloir ni nourrir de l'amertume vis-à-vis de cette drôle de mère que j'ai été. Il n'est pas rancunier. Et pourtant, il en a souffert... Je ne sais s'il a compris des choses de moi, de notre histoire commune. Nous n'avons jamais parlé de son enfance. Jamais. »
Politique
« Toute ma vie, j'ai été très vacillante s'agissant de mes opinions politiques. J'ai soutenu Valéry Giscard d'Estaing, pris parti pour Jospin, affiché mes affinités avec les discours de Jean-Marie Le Pen... J'ai aussi sollicité Jean-Luc Mélenchon. Et si jamais un communiste prenait position pour une cause qui me tient à cœur, comme la lutte contre l'hippophagie, je courrais à sa rencontre pour le remercier... »
Vieillesse
« J'ai toujours vécu dans l'idée que l'on perd inévitablement ce que l'on a, et ma jeunesse, ma beauté, ma fraîcheur n'ont pas fait exception. Il ne me reste pas grand-chose de mes jeunes années, si ce n'est mon âme, une âme d'enfant, encore émerveillée par plein de petites choses. Je m'amuse et me désespère de tout. Je suis très naïve également, je me fais avoir facilement. »
Religion
« Je ne me suis jamais sentie à l'aise avec l'idée de religion. Je préfère une spiritualité libre, un rapport direct avec le ciel. J'ai très peu lu la Bible, tous ces textes me barbent. J'aime les lieux saints parce qu'ils sont beaux. Comme je l'ai dit, c'est l'esprit qui m'anime, ce vers quoi il tend. Le reste, les lois, les conseils et les confessions des hommes, je m'assieds dessus. Mais je comprends que certaines personnes, désespérées ou pas, aient besoin de croire. Cette idée de transcendance est présente dans mon rapport personnel avec la Sainte Vierge. (...) Je lui parle sans détour, sans bla-bla, parfois même je ne prononce aucun mot : je lui parle avec le cœur. (...) Si elle ne m'avait pas accompagnée de sa miséricorde au moment voulu, je serais morte depuis longtemps. J'en suis convaincue. »
Mort
« L'idée de la mort me tétanise. Car je ne suis pas sûre qu'on retrouve, ailleurs, les gens que l'on a connus. (...) C'est l'après-mort qui est affreuse. Ce que le corps devient. C'est sale. La crémation n'est pas une solution, car j'ai peur de brûler et j'ai peur du feu. Je me sens très loin de l'idée que je retournerai à la terre. Je ne sais si la vie après la mort existe. Je ne sais pas et je n'en ai pas forcément l'espérance. Quel bordel peut encore nous attendre de l'autre côté ? Autant que l'on dorme. Pour toujours. »
Sacrifice
« Si, un jour, on m'avait proposé un pacte en me disant par exemple Brigitte Bardot, donnez votre vie et on ne tuera plus jamais de chevaux pour les manger, ou encore on ne chassera plus d'animaux sauvages, je me serais agenouillée, en attendant mon exécution, sans aucun problème. »
« Larmes de combat », de Brigitte Bardot, éditions Plon. Les droits d'auteur seront reversés à sa fondation.